Rares sont les albums issus de l'underground qui atteignent un tel degré de perfection.
Elle est la frontwoman du groupe de métal symphonique Remember the Light et elle opère dans un registre soprano léger qui confère à sa voix virtuose (colorature ?) une apparente fragilité. Cécile Delpoio a choisi cette fois de diriger pleinement le navire dans un opus solo. Il nous emmène sur...
« Tuolla »
« J'avais d'autres choses à exprimer, et c'est pour ça qu'est né ce projet », dit-elle. Ces choses, Cécile les raconte à travers un concept-album dont la trame se développe dans un monde féérique appelé Tuolla. Son héroïne, Aodrëna, n'a jamais rien connu d'autre que ces terres flottant dans le ciel, ces lieux paisibles, cette beauté pure qui vous rassure où que vos yeux se posent. Mais l'herbe semble toujours plus verte ailleurs, même dans les contes. Un jour, Aodrëna quittera son monde à la recherche du bonheur...
Donnant libre court à son inspiration, Cécile estime ce onze pistes d'environ cinquante-trois minutes métallo-compatible et cite pour repères Dead Can Dance, Hans Zimmer, Narsilion et Ordo Funebris. « La description qui colle le plus serait Dark Fantasy et Ethereal Folk, une plongée dans un monde fort lointain, qui, je l'espère, vous plaira », précise-t-elle. L'album est accompagné d'un livret qui développe l'histoire complète imaginée par l'autrice. Développant son sens artistique au travers d'autres disciplines, Cécile a également dessiné l'univers de « Tuolla » et signé ou co-signé les clips.
« Once upon a time
In a world called Tuolla
There lived a young woman
Her name was Aodrëna ».
- Dans un anglais très harmonieux, c'est « Aodrëna », l'héroïne, qui nous ouvre les portes de ce conte fantastique. Le décor médiéval se pose par une voix très haute portée par des sonorités classiques : flûte, clavecin, violoncelle. Cécile Delpoio, presqu'a capella,se fait saisissante.
- « Highest Dreams » reprend très haut, mais c'est en bas que la voix nous emportera sur le dernier tiers de la mélodie, dans un très bel assemblage vocal et instrumental.
- « Au sommet de la Tour » pose ses nappes de clavier sous de jolis choeurs. Le chant évoque l'Orient et la mélodie en notes frappées nous entraîne dans une courte pièce à la manière d'une boîte à musique.
- C'est encore l'Orient et ses mystères qui habite l'introduction de « Above the Sky », installant une ambiance atmosphérique sur laquelle voix et violon vont dansants.
- « Erimaïlma » est le premier titre à l'ambiance sombre. « This was the name of the world below... » chante Cécile dont le vibrato se fait inquiétant. Cette pièce de dix minutes est forte de vingt-cinq voix et a nécessité trois jours complets d'enregistrement. « Un morceau qui passe par tous les styles, darkwave, neo-classique, pop, avec quelques passages plutôt théâtraux », explique l'artiste. Les lyrics incantatoires se font agressives jusqu'à l'arrivée de choeurs angéliques, finalement emportés dans une orchestration infernale et grandiose. Puis le morceau retourne dans les cieux avec un talent lyrique icontestable.
- Après cette pièce épique « U-Turn (Through the Forest's Laments) » semble proposer une respiration, cependant que des voix nous assaillent de toutes parts jusqu'à une fin baroque.
- « The Castle » reprend cette thématique médiévale et montre une instrumentation délicate avant de nous emporter par sa mélodie sublime qui en fait l'une des pièces majeures de l'album. Quant à Nils Courbaron (Sirenia), avec qui la réalisatrice Cécile Delpoïo a déjà collaboré, son inspiration démontre qu'il n'a clairement pas fait le déplacement sur Tuolla pour rien !
- « The Ungrateful Daughter » s'avance au piano. Le chant est toujours aussi incroyable - Cécile Delpoio s'inscrit clairement dans un registre lyrique d'exception qui suscite l'admiration.
- « The Serpent's Venom » frappe à coups sourds. La voix se fait sorcière tandis que l'héroïne sombre dans ses cauchemars.
- « Stars » laisse une place au piano avant l'arrivée d'une voix qu'on n'identifie pas immédiatement : la note pure tenue par Cécile se confond avec un instrument.
A propos de la vidéo qui accompagne ce titre, Cécile explique :
« Ce clip a été réalisé sur un an et demi car j'ai collecté durant toutes les saisons des images dans toute la France et même jusqu'en Espagne pour retranscrire mon amour des paysages et de la nature vierge de toute trace humaine... Des réveils à quatre heures du matin pour filmer le soleil levant au-dessus des incroyables inondations de Seine-et-Marne en plein hiver, des nuits à filmer la voie lactée dansant autour de notre planète, et puis quand même des couchers de soleil sur les plages en été, parce que je ne vais pas souffrir en permanence. J'espère pouvoir vous faire rêver à travers ces images de notre très belle Terre.
Vous verrez aussi une merveilleuse prestation de Laure Ali-Khodja la chanteuse d'Elfika qui officie cette fois en tant que danseuse et sans qui ce clip aurait eu quand même beaucoup moins de magie. »
- « Flying » mêle guitare claire et choeurs dans une pièce très douce au langage mystérieux qui nous accompagne à la sortie de l'album. La mélodie donne une dernière occasion à la voix d'aller chercher ses notes très haut.
Cécile Delpoio est accompagnée sur « Tuolla » par Olivier Reucher (compositeur/pianiste de Remember The Light) aux arrangements et par Stayn Karhien (guitariste de Remember The Light) à la guitare. Côté mixage et mastering, elle a fait confiance à Sébastien Latour.
L'artprint de Tuolla est signé Cécile Delpoio
Incitation musicale au voyage dans un univers d'heroic fantasy, « Tuolla » est une oeuvre originale particulièrement bien ficelée dans un packaging soigné. Rares sont les albums issus de l'underground (comprenez : avec un budget loin d'être pharaonique) qui atteignent un tel degré de perfection. C'est rendu possible parce que Cécile est une cumularde : écriture, composition, dessin, design, vidéo, chant... Ce couteau suisse artistique sait absolument tout faire ! Ses dons multiples permettent à la magie de « Tuolla » d'arriver inaltérée sur vos platines.
« Tuolla » est aussi la confirmation qu'on espérait de la part de ce jeune talent si prometteur, qui a déjà montré tant de belles choses. Allant jusqu'au grandiose, parfois catchy, ce conte musical confirme la complétude de l'artiste et sa capacité à conduire des projets ambitieux. Techniquement, sa voix est aussi belle dans les médiums qu'impressionnante dans les aigus, et son chant séraphin s'accompagne d'orchestrations délicates jouées au cordeau. La production parfaite prouve que la Parisienne a fait les bons choix jusqu'au bout, en s'entourant d'une équipe de confiance aussi discrète qu'efficace. On salue donc la maîtrise du projet et on applaudit cette réalisation, premier des travaux d'Hercule d'une artiste qui force notre admiration en délivrant un premier long format incroyablement abouti.
On vous invite à partir à votre tour en voyage sur « Tuolla », dont les cieux merveilleux se pareront sur votre passage des couleurs du Metal, du Gothique, du Dark, du baroque et de l'art lyrique à la fois.