Non conventionnel, ce sept titres a tout d'un album tant il réussit à développer de belles choses sur vingt-cinq minutes. Par Ahasverus DEEVA revient avec sept titres.
Un format sur lequel la formation parisienne se montre particulièrement à son affaire puisqu'elle s'y initiait en 2017 avec l'EP « The Wild One », un tournant électro-heavy dans sa discographie. On ne s'étendra pas sur le catalogue du groupe compte tenu des informations parcellaires que nous avons pu réunir. Nous nous intéresserons directement au nouvel opus, « On A Hot Track », disponible depuis le 04/10/204 chez M&O Music.
Retraçons tout de même brièvement l'histoire : 2006 marque sa naissance à Montlhery. C'est un quatuor, avant qu'il ne resserre ses effectifs en un duo composé d'Emilie Chioccarello (chanteuse et guitariste) et de Michel Izunsky (guitariste lead). Soucieux de conserver son étoffe, DEEVA se produit cependant toujours au format basse/batterie/ guitare(s).
Cette année 2024 est donc celle du retour discographique de DEEVA avec un sept titres d'une durée de vingt-cinq minutes.
« On A Hot Track » est livré dans une pochette au visuel qui sent le rock, le riff et la sueur : une photo de scène à la manière du « London Calling » de The Clash. On adore !
« On A Hot Track » s'ouvre sur « Pas Conforme », un titre électro-punk aux boucles rapides qui fonctionnent à 110%. Les lyrics en Français se taillent la part du lion, même si le groupe se plaît à utiliser indifféremment notre langue et l'Anglais au sein d'un même morceau, voire au sein de la même phrase. Les textes accrochent l'attention et Deeva dessine une histoire à chaque chanson : « Rentrer dans les rangs / Avoir des enfants / C'est pas dans mes plans » chante Emilie qui assure : « je ne vais pas me gêner pour en rajouter. »
Mid-tempo rock (« Je M'Emporte ») ou bourrasque électro tranchée par des riffs heavy (« Hot Track ») parfois évocatrice de synthwave (« Ashtag »), l'EP « On A Hot Track » montre à quel point Deeva affiche une belle santé.
Non conventionnel, ce sept titres a tout d'un album tant il réussit à développer de belles choses sur vingt-cinq minutes.
On recommande.
Une oeuvre délicate qui suspend le vol du temps et près de laquelle il fait bon se poser. Par Ahasverus
Peut on être et avoir été ? Le quatorzième album studio de THE CURE tend à prouver que oui...
Seize ans après « 4.13 Dream », The Cure, le groupe aux trente millions d'albums vendus à travers le monde, revient. « Songs of a Lost World », son nouvel opus, est livré dans une pochette présentant une oeuvre du sculpteur slovène Janez Pirnat.
Privilégiant les longues plages instrumentales (« Alone », « Endsong », « And Nothing is Forever »), The Cure aligne les compositions marquantes (« A Fragile Thing », « Drone:Nodrone »). Créatif et séduisant, quand bien même il n'a plus le souffle novateur de ses premiers albums, The Cure reste tutélaire et semble inoxydable. Imperméable au temps, la voix de Robert Smith est une madeleine de Proust extraordinaire qui nous fait voyager. Aujourd'hui, c'est clair, The Cure a ce pouvoir extraordinaire d'en appeler à la nostalgie pour nous renvoyer aux premiers temps de sa new wave tout en nous touchant de ses mélodies nues actuelles (« I Can Never Say Goodbye »). On sort de l'album ému, désireux de l'écouter encore tandis qu'il grandit et fait son oeuvre en nous. Cultivant la mélancolie en expert, The Cure a traversé des décennies de musique sans vraiment changer, conservant statut et magie. On ne passera donc pas à côté de « Songs of a Lost World », une oeuvre délicate qui suspend le vol du temps et près de laquelle il fait bon se poser.
« Songs of a Lost World » a été écrit et arrangé par Robert Smith, produit et mixé par Robert Smith & Paul Corkett. Il a été enregistré aux Rockfield Studios (Queen, Motörhead, Coldplay).
« Songs of a Lost World » est disponible depuis le 01/11/2024.
MC5 balance ses riffs en faisant des oeillades au rock crasseux, au vieux hard un peu roublard et au funky le plus canaille. C'est terriblement sexy et incroyablement savoureux ! Par Ahasverus
Cinquante-quatre ans après son premier album studio, MC5 occupe l'actualité. Il met un point final à une discographie peau de chagrin mais qui, à l'instar de celle des Sex Pistols, a marqué significativement l'histoire du rock.
Formé en 1964, MC5 construisait sa réputation sur scène et explosait dès 1969 avec son mythique Live « Kick Out the Jams ». Il sortait un an plus tard « Back in the USA », son premier album studio, plus sage et moins considéré. Un disque que Lemmy Kilmister qualifiait cependant de « rock'n'roll non traité » et que le magazine Rolling Stones a classé parmi les cinq cents meilleurs albums de tous les temps.
En 1971, MC5 sortait « High Time » mais voyait son succès décroître. L'album n'est pourtant pas mauvais, et des pastilles comme « Sister Anne » ou « Baby Won't Ya » restent de bons morceaux de rock 70's.
Après divers mouvements de line-up, MC5, rongé notamment par ses excès, splitte en 1972.
Dans les années 2000, Kramer (guitare), Davis (basse) et Thompson (batterie) se retrouvaient pour raviver l'esprit du MC5 avec une série de concerts auxquels participaient notamment Lemmy Kilmister (Motörhead), Ian Astbury (The Cult) et William Duvall (Alice in Chains).
Davis décèdait en 2012 tandis que Kramer et Thompson se retrouvaient en 2024 pour un baroud d'honneur : l'album « Heavy Lifting ».
Il sortait le 18/12/2024 via earMusic.
Ni Kramer ni Thompson ne verraient la sortie de cet opus, puisque le premier décèdait en février 2024 et le second en mai de la même année.
Artisan de cet album posthume, Wayne Kramer avait cependant le temps de participer à son lancement. Il expliquait au mensuel anglais Uncut : « Vivre longtemps et rester créatif. Telle est mon attitude. Cet album s'inscrit dans la continuité de High Time. Je pense qu'il est de la responsabilité d'un artiste de refléter l'époque qu'il traverse. Et je pense que nous avons fait un album qui est en phase avec notre situation actuelle et les défis auxquels nous sommes confrontés, et qui véhicule un message positif. »
Kramer ajoutait à l'intention de ceux qui persifleraient que le MC5 de 2024 n'est plus celui des 70's :
« Ils ont raison. Ce n'est pas la même chose. Nous ne vivons pas en 1968. Nous sommes dans l’époque dans laquelle nous vivons, et il faut en tenir compte. Dans tout art, il faut répondre à la question : et alors ? Pourquoi devrais-je m'en soucier? Parce que j’ai fait la meilleure musique possible. »
Pour cet album, Kramer a co-écrit une quinzaine de morceaux avec Brad Brooks, qui tient le chant lead sur l'album. Ce dernier avait été repéré par Bob Ezrin et Wayne Kramer à la sortie de son single « God Save the City ».
Bob Ezrin quant à lui est le producteur de l'album. Ezrin a notamment produit ou coproduit « Destroyer » de Kiss, « The Wall » de Pink Floyd et « Welcome to my Nightmare » d'Alice Cooper. Il donne sa vision de l'album :
. « Il y a un peu de heavy metal. Il y a aussi pas mal de funk. Mais c'est un disque heavy, et c'est un disque de guitares à gauche, à droite et au centre. La plupart du temps, c'est un mur de guitares, et c'est surtout Wayne et son éthique qui sont à l'origine de ce disque. C'est un instantané d'un guitariste au sommet de son art. »
Slash, Tom Morello (Rage Against the Machine), William DuVall (Alice in Chains) et Vernon Reid (Living Colour) font partie des musiciens invités sur ce nouveau MC5.
Long de quarante-cinq minutes, « Heavy Lifting » s'ouvre sur le titre éponyme avec une ligne de basse proche du « Stargazer » de Rainbow.
L'entame de l'album est plutôt hard-rock, avec des titres qui rappellent le travail de groupes comme Foghat (« Barbarians at the Gates », « Boys Who Play With Matches »), Thin Lizzy avec une pincée de Boston (« Blind Eye »), ou UFO, tandis que William Duvall et Slash prennent part à l'une des meilleures pièces de la galette (« The Edge of the Switchblade »).
MC5 ou plus MC5, on l'ignore. Ce qui est sûr c'est que « Heavy Lifting » nous ramène — et Bob Ezrin n'est pas pour rien dans l'affaire avec ce son digne d'un vieux Black Sabbath qui permet de profiter de chacune des lignes instrumentales — au tout début des 70's, à la porte de clubs enfumés dont s'échappe une soul toute prête à donner naissance au funk (« Change, No Change », « I Am the Fun », « Twenty-Five Miles », « Because of your Car », « Hit it Hard ») et où les frontières du rock restent à définir.
De son époque ou non, le dernier album studio des MC5 balance ses ultimes riffs en faisant des oeillades au rock crasseux, au vieux hard un peu roublard et au funky le plus canaille du temps d'avant. C'est terriblement sexy et incroyablement savoureux !