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Les Inestimables
Mohovivi (heavy rock), « Komando » (2022)
Le 19/03/2024
Un album inestimable : « Komando » confirme que les chats ne font pas des chiens.
Par Ahasverus
Sorti en 2022, « Komando » est un album de Mohovivi, contraction des surnoms de Moho Chemlakh et de Yves Vivi Brusco.
Moho Chemlakh, guitariste sur plusieurs albums de Trust dont « Marche Ou Crève » ; Yves Brusco, qui succéda à Raymond Manna au poste de bassiste de la formation francilienne à partir de l'album « Répression ».
Ils sont accompagnés sur ce projet par Camille Sullet à la batterie et Sylvain Laforge à la guitare.
Yves Brusco tient le micro et s'occupe des textes écrits en Français. S'ils gardent un oeil sur notre société, les lyrics de Mohovivi sont moins vindicatifs (« Bang Bang Bang ») que ceux des auteurs de « L'Elite » et de « Fatalité », s'intéressant par ailleurs aux destins d'Ernest Hemingway ou de Amy Winehouse (« Camden Square »).
Vingt-huit minutes seulement pour cet opus de neuf pistes dans lequel rien n'est à jeter ! Résolument rock, il nous confirme que les chats ne font pas des chiens. La voix et la façon de chanter de Vivi renforcent cette conviction, n'étant pas sans rappeler celle de Bernie Bonvoisin avec un mimétisme parfois confondant (« Les Seigneurs de la Nuit », « C'est Pas Facile »).
L'album est pavé d'excellentes compositions (« Tic Tac », « Game Over ») qui portent « Komando » à un haut niveau de songwriting et d'interprétation, avec des musiciens parfaitement à leur affaire.
On ne peut, on l'a souligné, s'empêcher de faire la comparaison avec Trust, et force est de constater que cette galette la soutient, même si elle officie dans un registre plus rock.
On prend le pari que ce « Komando » aura réjoui nombre de fans de Trust sans pour autant qu'ils puissent jamais crier au plagiat. Le niveau d'excellence de cet album est tel qu'on espère que la paire Chemlakh/Brusco nous prépare un Mohovivi II.
GRACE POTTER (rock), Mother Road (2023)
Le 17/03/2024
Un album inestimable : Dix titres de blues rock particulièrement riches en groove.
Par Ahasverus
Si la réputation de Grace Potter est installée aux USA, elle est encore peu connue en France, au point que le webzine Fargo Mafia la présentait comme « l’un des secrets les mieux gardés du rock américain », formule heureuse s'il en est.
Pour définir son style et son statut, nous dirons que Grace est un peu une Gaëlle Buswel en format US, c'est à dire toutes proportions gardée puisque ramener les USA à l'échelle de la France revient à comparer le Verdon au Grand Canyon du Colorado. Néanmoins si vous appréciez l'une, on prend le pari que vous aimerez l'autre.
« Mother Road » est une galette de dix titres de blues rock sortie via Fantasy Records le 18 août 2023. Il s'agit du cinquième album solo de la musicienne américaine. Particulièrement riche en groove, parfois tendre (« Little Hitchiker»), parfois western (« Lady Vagabond »), merveilleusement servi par un clip éponyme qui propose un scénario à la Thelma & Louise, « Mother Road » balance et nous entraine dans un road-trip à la Steinbeck, l'auteur d'A l'Est d'Eden qui donnait à la Road 66 le nom de Mère des Routes dans son livre Les Raisins de la Colère.
C'est maintenant au tour de la rockeuse américaine de nous servir de guide au rythme de sa voix légèrement râpeuse, de ses riffs et de son orgue Hammond, « Mother Road » s'illumine alors, ose jusqu'à nous rappeler le premier album de Mika (« Masterpiece »).
L'album est incontournable. Il est produit par Eric Valentine (Slash, Queen Of The Stone Age).
Les Inestimables d'Ahasverus : ACHING BEAUTY, L'Ultima Ora (2004)
Le 23/10/2022
Un album touché par une grâce évidente, et finalement chef d'oeuvre.
Encore un premier album dans les Inestimables. Si j'en parle, c'est qu'il a lui aussi ce ton qu'on ne retrouve pas ailleurs, qui fait que j'y reviens fidèlement depuis sa sortie, en 2004. Il paraissait alors chez Brennus.
Son point d'orgue tient sur une note : « Pairsonality ». Minute précise 7:45.
Mais pourquoi commencer par la fin ?
On reprend pour les retardataires...
Aching Beauty, groupe de métal progressif. Il se forme en 1997.
EP d'abord. Puis Album.
« L'Ultima Ora »
Passons sur l'artwork, son flou un peu dispensable autour du visage. Il a fait le job, retenu l'attention alors.
Production excellente. C'est perceptible dès les premières secondes. De magnifiques arpèges soulignés par un clavier. Piano, flûte. Glissent rapidement sur « Sublimation - Peter Pan Syndrome ». Escalade « Sublimation - Steps » et ses guitares puissantes.
La voix présente une certaine fragilité, un vibrato qui la caractérise agréablement.
Excellence du refrain, volubilité du clavier, virtuosité de la guitare.
Absolument magnifique ce « Sublimation - Steps ».
Il sonne terriblement, même aujourd'hui.
Le calme revient avec « Sublimation - Endlessly ». Je crois reconnaître un violoncelle.
« Pairsonality ». Mon morceau favori. Batterie solo. Basse percutante. Guitares heavy. Clavier enfin. Tout est paré pour porter la voix qui tarde à venir. Ca s'emballe et tourbillonne. Le chant vient mettre de l'ordre après plus d'une minute trente de musique. Il explore les basses, monte. Vibrato. Structure agitée. Refrain.
« Looking for a goal, searching for an idol »
Très beaux choeurs (au clavier je suppose).
Le thème se répète, invente des variations.
« Finally found my god, followed my idol »
Décline.
« Finally lost my god, destroyed my idol /Needed a man to transfigure me/He could be my guide, provide me strength and pride »
Jusqu'à l'envolée finale :
« Now that I’ve killed him… »
Cette note, la voix va la chercher et la tenir dans les aigus. C'est juste incroyable.Tout l'album s'articule autour. On est au sommet de l'oeuvre.
La descente se fait par une pente douce très agréable : « Glittering Images ». Les voix s'enchevêtrent. Les riffs reprennent le pouvoir sur la fin et « The Hundredth Name » nous ramène sur des terres chères à Dream Theater.
Calme et arpèges pour « Soul's Wrinkles ». La voix effleure les cordes avec son vibrato. Puis elle part en fausset. Le morceau reste léger, à peine écorné par la basse qui cherche à claquer.
Prog Metal encore pour « Shatter The Shell », première des quatre parties du titre « L'Ultima Ora » qui conclut l'album. Guitare très technique, riffs solides. Puis « Lost », morceau à la construction inattendue qui ne rentre dans le rang qu'à sa fin. La guitare lui règlera son compte avec « Aching Awakening », pièce instrumentale d'une grande richesse.
L'album trouvera sa conclusion en beauté avec « Masked Life », qui contient tous les ingrédients qui l'ont édifié. Fond prog' metal, riffs puissants, voix délicates, dialogues claviers/guitares, touches folk. Le morceau s'étire sur sa fin, comme pour récupérer après l'effort.
Aching Beauty, talentueux. Tellement prometteur dans ce registre. Les Parisiens se tourneront pourtant vers le rock indé et le chant en Français dès après « L'Ultima Ora ». Ces mecs avaient un beau bagage musical, et un chant d'une grande subtilité. Ils laissent au prog' cet album touché par une grâce évidente, et finalement chef d'oeuvre. Auraient-ils pu mieux faire ? Qu'auraient-ils pu ajouter après cette note ultime décrochée à 7:45 de « Pairsonality » ?
Les Inestimables d'Ahasverus : TRANCE, Break Out (1982)
Le 15/10/2022
Si vous l'aviez écouté en 1982, vous vous en souvenez. Si vous l'avez raté c'est sans importance : il est aussi bon en 2022 qu'il l'était voici quarante ans.
1982.
On était bien, hein Tintin ?
Une belle année métallique ! Elle a donné naissance à quelques classiques du genre.
Pas besoin de vous dire le nom des groupes ; ces albums ont écrit l'histoire du heavy metal.
Lecteur d'Ahasverus, teste tes connaissances !
- quel groupe a sorti Black Out ?
- quel groupe a sorti Creatures Of The Night ?
- quel groupe a sorti Under The Blade ?
- quel groupe a sorti Screaming For Vengeance ?
- quel groupe a sorti The Number Of The Beast ?
- quel groupe a sorti Battle Hymns ?
- quel groupe a sorti Restless & Wild ?
Tu as les sept réponses ?
Ecris à la rédaction d'Ahasverus - Métaux en tous genres, et passe un week-end à Clichy-la-Garenne (*) chez notre chroniqueur Pépé Stakatto !
(*) : On sait, ça fait pas rêver, mais le zine a peu de moyens. Et puis tu feras une bonne action : il nous fallait quelqu'un pour changer les couches à Pépé !
1982 sortait aussi l'album « Break Out ». Plus discret, mais redoutablement efficace !
Plus redoutable que sa pochette : cierge, cercueil, brouillard, vampire, Flying V... Clairement pas un Molly Hatchet !
A part le logo du groupe, il n'y a pas grand chose à sauver... Mais remettons le visuel en perspective : nous sommes dans les années 80. La mode capillaire, les tenues vestimentaires, le succès des Forbans... Les goûts étaient ce qu'ils étaient. Les vieux se souviendront. Les jeunes pardonneront.
Mais qu'importe le flacon... Si tu aimes le heavy, je te promets l'ivresse ! « Break Out », premier album d'un jeune groupe allemand, qui affûte tout de même ses riffs depuis déjà quatre ans.
L'album démarre. Explosion ? Coup de tonnerre ? Ce qui est sûr, c'est que l'opus trouve son rythme dès la première piste (« Break Out »). Un morceau court. Moins de trois minutes qui suffisent pour mettre toutes les pendules à l'heure à l'heure allemande !
Ce qui est clair également, c'est que la production, toute 80's qu'elle soit, sonne toujours.
« Confessions ». Guitares à la tierce — ce sera l'un des gimmicks de l'album.
Le chant est un peu voilé. Comme Phil York (Silvertrain), comme Spike (The Quireboys), Tom Keifer (Cinderella), Dan McCafferty (Nazareth)... le genre de signature vocale que j'adore !
« Get It Now ». Un riff d'apparence simple. Cependant plusieurs motifs de guitare courent en même temps. La guitare accompagne le chant, le prolonge, généreuse, mélodique (« Burn The Ice »).
Lothar Antoni étend son domaine vocal. Son voile disparaît dans les basses. Totalement.
Faussement simpliste encore, parce que tellement efficace : « For Your Love »
Lothar Antoni aboie, gémit :
« I've been payin' / Payed so hard for your love / Became a drinker / You shouldn't see that for your love... »
Le duo basse/batterie soutient sévère.
« Loser » lève le pied mais ne change pas le ton. Le morceau se construit progressivement au fil de ses sept à huit minutes, à l'aide de ponts, d'accélérations...
« Ain't No Love » retrouve les fondamentaux. Riff simple décliné à la tierce. Batterie et basse au coude à coude.
Le legato de Lothar Antoni (« Party's fine you smoke a lot of grass / Mind sinkin' in your whiskey glass ») se fait savoureux sur « Ain't No Love ».
« Baby Child » conclut, magistralement un album qui concède peu de pertes. Ce morceau est à Trance ce que « Stairway To Heaven » est à Led Zeppelin, « November Rain » à Guns N' Roses, « Love Kills » à Hot Hell Room.
C'est la guerre. Un père chante une berceuse à son enfant. Les bombes ont tout ravagé, sa mère est morte. « Continue de rêver » psalmodie le père. Lothar Antoni monte peu à peu, donne de l'intensité. Accélération libératrice, batterie/guitare/basse. Rupture/reprise. Le morceau finit en apothéose dans une rythmique effrénée survolée par un Lothar Antoni très haut dans les aigus tandis que les gaz font leur effet.
Quarante minutes. Fini déjà.
C'est que rien n'est de trop dans cet album, totalement représentatif du heavy des 80's quand il est bon.
Ses points forts : guitares à la tierce, solide sens mélodique, un chanteur à la voix atypique, et un son qui a su traverser les décennies sans une ride.
Si vous l'aviez écouté en 1982, vous vous en souvenez. Si vous l'avez raté c'est sans importance : il est aussi bon en 2022 qu'il l'était voici quarante ans.
C'est donc le moment de le (re)découvrir.
Les Inestimables d'Ahasverus : VOODOO SMILE, All Behind You (2002)
Le 11/10/2022
Boban Milojevic fait groover l'Anglais comme un Américain !
Les cinquante premières secondes de « All Behind You » vous rappelleraient presque la new-wave des 80's.
Pourtant c'est bien vers le heavy mélodique des années 90/2000 que nous entraînent les guitares de « Hard Times ».
Il ne subsiste plus aucun doute dès l'arrivée de la voix de Boban Milojevic.
Boban Milojevic. Extraordinaire, ce mec ! Il fait groover l'Anglais... comme un Américain !
Boban transcende les mélodies par un placement parfait. Il est extrêmement heavy. Il délivre ici l'une de mes prestations vocales préférées du métal français, développant des notes impeccables sur plusieurs niveaux. Son taf, son phrasé... Orfèvre ! Quant à la guitare, elle est virtuose (« No One Knows »), s'inspire du classique (« Forever »), trouve le chemin des mélodies et nous entraîne avec elle.
Le génie pointe dans cet album. Dès la seconde piste. « Far Away » aurait pu se retrouver sur les meilleures galettes de heavy mélodique US. Bluffant !
Ce n'est pas le seul : « Get The Fire » est tout aussi irrésistible, et on sent tout ce que morceau donnerait sur scène.
Voodoo Smile se permet une power ballade. Refrain construit en canon, très efficace (« All Behind You »). Le chant admirable va crescendo. La guitare est inventive.
Puis la ballade guitare/voix (« How Can I Say »), également réussie.
Malgré la production qui manque un peu de coffre, le groupe montre une carrure qui lui permettrait de s'imposer. La magie du songwriting opère. Quand un grand compositeur rencontre une grande voix (Boban ne craint pas de se frotter au répertoire de Billy Idol avec la cover de « Rebel Yell »), on obtient de l'or. « All Behind You » est une pépite.
Certes, le produit fini présente quelques faiblesses, bien compréhensibles pour un premier album. Mais loin d'êtres rédhibitoires, elles donnent du cachet et sont largement compensées par ce sens de la composition qui atteint les sommets du genre. Sommets dans le plein des rythmiques, dans la virtuosité de la lead, dans la pertinence des lignes de chant.
Alors en dépit de ses inégalités, « All Behind You » emporte l'adhésion, devient culte, vous habite, revient régulièrement faire sonner votre platine, les cheveux en bataille mais toujours aussi sémillant.
L'inspiration du compositeur, le chant taillé pour le heavy mélodique, la virtuosité du guitariste. Trois points forts qui font de ce All Behind You » un album inestimable contre lequel le temps ne peut rien.
Boban quittera rapidement Voodoo Smile pour former Snake Eye. Voodoo Smile n'aura sorti qu'un grand premier album. Il était une fois, chez Brennus, en 2002...
Les Inestimables d'Ahasverus : KAROLINE, Karoline (1980)
Le 01/10/2022
Si vous ne savez pas ce qu'est un album culte, « Karoline » en est un parfait exemple !
Nous sommes en 1980. Trust a forcé la porte des radios grandes ondes avec deux titres historiques : « L'Elite » (1979) et « Antisocial » (1980).
A peine plus sage, « La Bombe Humaine » (1979) de Téléphone est sur toutes les lèvres.
Le hard-rock français a le vent en poupe et caracole en tête. Avec Shakin Street, Ganafoul, Océan, arrive dans la ruée un vinyle au rouge provocateur : « Karoline ».
Karoline, c'est un groupe Niçois, un quatuor. Il s'est formé un an plus tôt. Et déjà, un premier album...
Un hard bien carré, avec un son qui cogne pas mal. Aujourd'hui encore, il sonne. La batterie frappe, la basse se place bien, la gratte enchaîne les bons riffs, balance des bons soli. Là dessus, une voix, un brin rocailleuse, vous râpe la peau. Ca vous le percevez dès « Couche Toi Sur Mes Rêves », la première piste. On a affaire à du bon hard-rock, à des mecs qui savent jouer. « Sniff l'Odeur des Camions » presse le pas et confirme.
Et puis soudain c'est l'explosion. Il vous pète à la gueule. Il a le truc qui transforme un bon album en un album génial... C'est un détail qui fait la différence. Ici, c'est le texte. Le mec qui a fait les paroles à un ton à lui. Il rend ses textes vivants, drôles, argotiques, inédits, les fait sonner, nous réjouit.
« Compartiment couchette/ Y a qu'toi et deux minettes / Dans ton sommeil tu délires », chante Tafini.
Le compartiment s'anime sous nos yeux, dans la pénombre. On imagine le type perturbé qui s'agite. La gouaille de Karoline explose. On se gargarise de sa truculence tandis que les riffs nous coupent en deux.
« Nanas/ Compartiment nanas / Pas pour toi... »
Que ce mec, ce loser, ce mytho, se fasse virer du compartiment, c'est plutot drôle.
Et musicalement ça chôme pas. Ca continue à groover. Solo de guitare, roulement de basse qui nous invite... C'est géant... Et les choeurs, écoute : « Na Na Na Na »...
« — Pas pour toi ! » gueule Tafini.
Rien n'est négligé : la couverture musicale est parfaite (« Sexy Baby », plus sérieux et dramatique) ; Karoline multiplie les saynètes, narre les ambitions d'un gigolo (le savoureux « Biftons ») sans sacrifier jamais l'efficacité du riff à l'autel du bon mot . (« Gueule de Bois », « Accroche-Toi»).
Et puis nouveau coup de génie : « Rockaroline ».
Une espèce de loubard économise sou à sou pour se payer la péripatéticienne de ses rêves... La seule qui défonce son jean, j'ai nommé Karoline... Celle qui donne son nom au groupe, à l'album...
Il touche au but, mais...
... Mais écoutez plutôt Serge ! Il raconte ça mieux que moi :
« Hey ! Y a qu'toi qui tient ta place / Ta dégaine c'est la classe... »
L'album se termine sur l'efficace « Rock'N Roll Star », pas en reste côté trivialité.
J'espère vous avoir convaincu...
« Karoline », c'est un album qui traverse les mémoires sans ride malgré ses décennies, et un inoubliable vinyle rouge. Du hard urbain, dans l'esprit, dans le texte.
Le génie de l'écriture (Serge Tafini le chanteur). Jamais égalé dans son genre. Porté par une musique (Jean Castaldi le guitariste) en béton, proche du courant australien (AC/DC, Rose Tattoo), jouée par des musiciens très pros (le groupe a d'ailleurs assuré quelques premières partie de la tournée « Back In Black »).
« Karoline », un album culte, longtemps introuvable. Il est disponible depuis cette année 2022 — enfin ! — en digital et en CD sur les plateformes, dans une version remasterisée. Petit clin d'oeil à l'histoire : le CD imite les sillons rouges du vinyle.
« Karoline » sonne aussi remarquablement que s'il était sorti hier, et sa gouaille est aussi réjouissante et envoutante qu'à son arrivée dans les bacs en 1980. Un grand-grand album du hard-rock français. Quatre hardos juchés sur un dépotoir, toujours aussi insolents.
Les Inestimables d'Ahasverus : AC22, The Trianon Sessions (2018)
Le 28/09/2022
Ce qui sautera aux oreilles, c'est le goût sûr de Jean Lou Kalinowski, et sa capacité à nous proposer toujours des chanteurs de haut niveau.
En 2018, Jean Lou Kalinowski, batteur historique de Shakin Street, inaugure avec « The Trianon Sessions » une série d'albums solo + guests sous le nom d'AC22.
Il explique : « Il y a deux ans, mes voisins faisaient beaucoup de bruit, et j'ai décidé de faire plus de bruit qu'eux. J'ai commencé à écrire des chansons et j'ai mis une annonce sur internet pour trouver des chanteurs. J'ai d'abord rencontré Vitha Sai, un jeune chanteur français. Nous avons enregistré six morceaux ensemble. Il aurait pu être prince, mais il a décidé de faire du rock'n'roll. »
Voila pour Vitha Sai, le prince de cet album... Jean Lou poursuit :
« Plus tard, j'ai rencontré Flora, qui chante sur deux titres. Raoul a aussi chanté sur deux morceaux, mais un seul a été retenu pour cet album. Lou Ben, qui interprète le dernier titre du CD, était le chanteur de Fred Guillemet. »
Pour compléter ce premier tableau Jean Lou fait appel à plusieurs musiciens de la scène métal — multi-instrumentiste, il renoncera ensuite à cette formule pour limiter ses collaborations à des chanteurs — parmi lesquels le bassiste Fred Guillemet (Trust et Shakin Street notamment) et le guitariste Georges Bodossian (Ocean).
Dix chansons, donc. L'album s'appelle « The Trianon Sessions », en référence au Trianon Studio d'Alfortville où il a été partiellement enregistré.
L'entrée en matière de « The Trianon Sessions » est incisive, et les riffs métalliques de « I'm Back » vous percutent.
Flora Roland est au chant. C'est une grande voix. Très grande. Polyvalente, impressionnante de registre et de technique — jugement confirmé dans le second morceau qu'elle interprète, « My Loss ». Je la comparerais volontiers à une chanteuse comme Annie Lennox. Sa nature soul joue les modératrices face au rock dur développé par la partie instrumentale.
Un succulent jeu de basse — la basse a pris une très belle place sur cet album — introduit « I'm Gonna Make It » qui permet de découvrir le registre androgyne de Vitha Sai.
Ce jeune chanteur extraordinaire se fond dans les chansons comme dans son canapé. Il gardera la main sur la plupart des titres de l'album, dans un registre rock/hard-rock. Il irradie ainsi « Men In Suits », « You Could Have Said Goodbye », « I Am The Power », « Light The Fire » ou « All Night Long » de sa voix incontestablement charismatique. Jean Lou Kalinowki ne s'y est pas trompé.
Ce qui sautera aux oreilles, c'est d'ailleurs le goût sûr de Kalinowski, et sa capacité à nous proposer toujours des chanteurs de haut niveau — les timbres de Raoul Mason-Neuve (le très beau « Blow My Sails ») et de Lou Ben (« Give Me A Sign ») ne sont pas en reste .
Jean Lou sait également s'entourer de musiciens chevronnés. Ils interprètent des compositions accrocheuses, dans une inspiration hard prégnante. On pensera à Led Zeppelin (« I Am The Power » et ses orchestrations ; « Men In Suits » et ses sonorités orientales). La voix de Vitha Sai, pas loin de celle de Robert Plant, oriente probablement notre perception. On sera aussi tenté de citer Bad Company en particulier, et les 70's en général, mais des 70's reliftées par des orchestrations modernes et fortes.
Malgré la diversité des intervenants et la multiplication des chanteurs sur la galette, « The Trianon Sessions » reste un tout cohérent, un très bon album de rock, bien produit, portant des morceaux construits avec recherche, interprétés de main de maîtres, parsemés de bonnes idées et d'instrumentations judicieuses, un disque qu'on a plaisir à écouter encore et encore, sur lequel les talents éclatent fusée après fusée, comme au feu d'artifice.
Le Lien :
Les Critiques ont dit :
- C'est la belle surprise Française de ce début d'année, que nous offre là le batteur de Shakin Street en faisant rayonner sur ce disque tout son talent artistique et créatif insoupçonné jusqu'alors, mais distillé en totalité avec une parfaite maitrise.
RockMeeting·
Les Inestimables d'Ahasverus : HOT HELL ROOM, Architect Of Chaos (2016)
Le 27/09/2022
Avec énormément de musicalité, « Architect Of Chaos » arrive à chaque coup ou presque à balancer des couplets/refrains qui vous pénètrent comme une évidence.
2016. Hot Hell RooM existe depuis plus de dix ans.
Les Franciliens ont affuté leur style et se sont faits sérieusement les dents avec un premier long format.
Il est sorti trois ans plus tôt et il s'appelle « Kali Yuga Bonfire ». Il est déjà bien bon, pour preuve l'énorme « Love Kills », qui aurait pu figurer sur un « Use Your Illusion » des Guns N' Roses aux côtés d'un « November Rain » ou d'un « Don't Cry ».
Hot Hell Room a donc creusé ses fondations. Elles sont capables de supporter l'édifice. Il s'agit d'un heavy/hard-rock qui se montre particulièrement à son aise pour vous accrocher dans le mid-tempo, même s'il sait développer un jeu flamboyant et rapide.
Le groupe a une particularité, une singularité, même : la voix de baryton — peu commune dans le milieu — de son chanteur/guitariste/prodige Loïc Malassagne, ainsi que sa prononciation très particulière qui donne à son chant cette fluidité. Ce frontman, c'est incontestablement l'atout majeur d'un quatuor qui donne une grande impression d'homogénéité et de cohésion. Mais que seraient les qualités d'un Malassagne si elles n'étaient servies par un songwriting à la hauteur ? Et dans ce domaine, « Architect Of Chaos » fait mouche remarquablement.
Avec énormément de musicalité, « Architect Of Chaos » arrive à chaque coup ou presque à balancer des couplets/refrains qui vous pénètrent comme une évidence (« No Perfect Flag », « Architect Of Chaos », « Nobody Came », « Chameleon », « New York Bird »).
Côté rythmiques, ça cogne ! La batterie rayonne (« Spark Until The Flame »), la basse tisse un tamis (« The Lord Is On Holyday »), et il se dégage de l'ensemble une sobriété d'une efficacité qui matche jusque dans les choeurs (« Chameleon »).
Hot Hell Room trouve ainsi le passage à chaque fois, tandis que la capacité du groupe à écrire des ballades aussi sublimes que les meilleurs Scorpions (« Despite », « Somber Days ») est encore magnifiée par ce chant.
« Architect Of Chaos » est un album de hard addictif, et il se réécoute avec la même fidélité qu'un bon Kiss, un Skid Row, un Black Sabbath, un Metallica, un Queen ou un Maiden. Il a les atouts du classique et se fait si inusable qu'il pourrait figurer dans le Top10 des meilleurs albums d'un métalleux, tout underground qu'il soit.
Admettez qu'un baryton aux côtés des ténors du Metal ça aurait de la gueule, non ?
Un lien :