Des références tutélaires jaillissent à l'écoute de la galette.
Par Ahasverus
L. A. Guns, expliquait Phil Lewis (chant) à Laurent Karila pour Hard Force en 2021, « c’est rock'n'roll et... sophistiqué. On est un groupe dont les influences sont assez visibles. C’est du rock classique, du hard rock... c'est Led Zeppelin, Deep Purple, Black Sabbath. » (retrouvez l'interview complète sur HARD FORCE).
Disponible depuis le 14/04/2023, « Black Diamonds », la nouvelle offrande des vétérans américains dans leur version Lewis/Guns, vient confirmer ces propos.
Des références tutélaires jaillissent à l'écoute de la galette : Led Zeppelin (« Gonna Lose », « You Betray »), Aerosmith (« Shame »), mais aussi le hard 90's de Skid Row ou des Guns N'Roses (« Lowlife »). Passage obligé, la ballade est plutôt réussie (« Diamonds »).
« Black Diamonds » est donc bien un album de hard-rock qui s'appuie sur des fondamentaux.
Quelques rappels punk (« Babylon ») contribuent à dynamiser l'ensemble.
Si tous les titres n'ont pas la même force, ils sont majoritairement bons, l'artillerie est globalement très efficace et les quelques pièces plus anecdotiques gardent des éléments intéressants.
Phil Lewis est un caméléon au chant multiple, Tracii Guns offre des soli qui se laissent savourer. L'alchimie fonctionne au sein d'une formation musicalement très solide.
L. A. Guns a du savoir-faire : en onze titres et quarante-et-une minutes, il aligne une majorité de titres forts dans un album de hard-rock d'obédience classique, solide et digeste, qui s'inscrit parmi les belles sorties de cette année 2023.
Tracklisting :
1. You Betray
2. Wrong About You
3. Diamonds
4. Babylon
5. Shame
6. Shattered Glass
7. Gonna Lose
8. Got It Wrong
9. Lowlife
10. Crying
11. Like A Drug
Greta Van Fleet ne manque ni de matière ni de jus, proposant un album de hard-rock particulièrement vif, toujours plaisant, parfois grand.
Par Ahasverus
En un peu plus de dix ans, Greta Van Fleet est devenu incontournable sur les cîmes du rock international.
L'histoire commence en 2012. Nous voici à Frankenmuth, blaze improbable, qu'on croirait tiré d'un vieux film de Polanski, pour une petite bourgade du Michigan fondée par des colons allemands à la fin du XIXème siècle. Jake Kiszka (guitare) débauche ses frères, Josh (chant) et Sam (basse, clavier), ainsi qu'un pote batteur ( Kyle Hauck alors ; Danny Wagner désormais) pour jouer du rock dans le garage familial. Le nom de baptême du quatuor formé par ces galopins (le petit dernier a juste dix-huit ans) pirate celui de la doyenne du bled.
GRETA VAN FLEET par Neil Krug
Le succès est fulgurant : dès le premier EP (2017) le single « Highway Tune » squatte le Billboard Us Maistream Rock durant quatre semaines. L'album qui suit en 2018 (« Anthem of the Peaceful Army ») atteint les premières places du Billboard US Rock Album à sa sortie. En 2019, c'est au tour de l'EP « From the Fires » de rafler le Grammy Award 2019 du meilleur album de rock ! Deux ans plus tard, Greta Van Fleet sort « The Battle at Garden's Gate », qui tente vaguement de se défaire de l'ombre du Zeppelin qui plane sur le groupe — à l'insu de son plein gré — depuis les origines. Mais chassez le naturel, il revient au galop, et 2023 sonne l'heure du retour au bercail avec un troisième album :
« Starcatcher »
Troisième album, avec une intention clairement affirmée : retrouver le son des débuts, celui du garage de la famille Kiszka. Dans l'esprit, hein ! Parce qu'entendons-nous bien : vous n'entendrez jamais quelqu'un sonner comme ça dans un garage ! Dans la pratique, on a clairement privilégié les meilleurs studios, les plus grands pros Jugez plutôt : Dave Cobb (Slash, Europe) à la production, Mike Stent (Björk, Madonna) au mixage, et Pete Lyman (Rival Sons, Europe) au mastering.
Par contre, côté pochette, je sais pas vous, mais moi c'est pas ouf !
Mais bon, pourvu qu'on ait l'ivresse... Musique !
Vous n'y couperez pas ! Dès la première piste, Greta Van Fleet réveille la comparaison avec Led Zep. Les vibrations de « Fate Of The Faithful » évoquent invariablement « No quarter ». « Thank You » et « When The Levee Breaks » sont les autres standards du géant anglais évoqués çà et là par les chroniqueurs. Il est clair que l'endiablé « Runway Blues » ou le folkeux « Farewell For Now », n'auraient pas dépareillé sur un bon Led Zeppelin.
On imagine bien ce que cette cascade de comparaisons peut avoir d'agaçant pour cette formation américaine qui cultive le déni avec obstination. Ils sont d'ailleurs les seuls: pour les autres, tous les autres, la paternité est encore plus évidente que celle du fils caché d'Alain Delon. Elle en devient clivante, certains critiques n'hésitant pas à noircir leurs papiers de mots assassins. Ainsi pour Sputnik Music, l'album « cesse d'être une expression artistique » et il flotte « dans sa propre stérilité », tandis que le Français Benzine estime que « cette filiation ostentatoire est peut-être le seul argument de vente de Greta Van Fleet. »
Quant à nous, nous trouvons ces hallalis bien précipités. Pour certaine qu'elle soit, l'influence de qui-vous-savez, ne doit pas masquer le brio avec lequel l'affaire est menée, un brio suffisant pour donner naissance à une suite de grands albums. « Starcatcher » n'échappe pas à ce qui est désormais la règle. Et puis quoi ! Greta Van Fleet ne saurait être confondu au blind test avec Led Zeppelin par un amateur de rock digne de ce nom. Ainsi ce nouvel opus apportera du plaisir à l'auditeur décrispé, car Greta Van Fleet ne manque ni de matière ni de jus pour reprendre le flambeau. La voix énervée de Josh Kiszka, capable de couvrir quatre octaves, n'est pas un ersatz de celle de Robert Plant, même si elle présente des similitudes, même si tel ou tel morceau évoque à nos esprits l'empreinte sacré.
Au résultat, le songwriting des Américains construit un album de hard-rock particulièrement vif, toujours plaisant, parfois grand (« Meeting the Master »). Et quand bien même ces Américains parviendraient au sommet par des voies ouvertes jadis par le fondateur du hard-rock britannique, ils auraient bien tort de ne pas les suivre, et nous de nous en priver !
Greta Van Fleet jouera à l'Accor Arena (Bercy pour les anciens du gaz) à Paris en novembre 2023.
Un EP qui sent bon la permanente et les guitares à la tierce.
Par Ahasverus
Big Red Fire Truck est originaire de la périphérie de Sydney, en Australie. Le quatuor se forme en 2016.
Il enchaîne ses premiers singles puis sort un EP éponyme en 2019. Vous pouvez l'écouter, il est d'assez bonne facture. Big Red Fire Truck y pratique un hard-rock très 80's. Digby (chant, guitare), explique : « Nous faisons cette musique parce qu'il n'y a pas assez de ce style dans le courant dominant et que des groupes comme Van Halen, Bon Jovi et Aerosmith me manquent. Avoir de la musique rock amusante à écouter me manque. Nous voulons garder cela vivant tout en arrachant les haut-parleurs de votre voiture. »
Le 04/08/2023 les Australiens reviennent pour agrémenter notre été d'un second EP de six pistes (une intro et cinq morceaux) : « Trouble In Paradise ».
Guitares à la tierce, choeurs qui fleurent bon le cheveu permanenté, harmonies vocales bien travaillées, Big Red Fire Truck ne sèmera probablement pas le méga-bordel espéré au Paradis : le hard FM qu'il pratique était déjà proposé entre 1981 et 1985 par un groupe comme Tygers Of Pan Tang («Trouble In Paradise », « Psychotropic Thunder »). Même si Big Red Fire Truck conserve de loin en loin une légère pointe d'accent australien.
Sans changer totalement sa guitare d'épaule, le quatuor s'éloigne de ses bases sur un titre, rangeant SUM 41 parmi ses influences (« Miami Skies »). Le rendu est fidèle au style pop-punk mais on avoue préférer le groupe dans des compositions plus caractéristiques des 80's.
Car globalement le songwriting de Big Red Fire Truck se fait accrocheur dans ces années-là, ses leads se montrant mélodiques à souhaits, ses rythmiques sonnant bien carré.
La voix haute de Digby est un atout certain. Elle vous évoquera dans une certaine mesure (« Hot Summer Nights ») les performances de Brad Delp (Boston) ou de Justin Hawkins (The Darkness). C'est vous dire tout le bien qu'on pense de ce chanteur aux qualités évidentes !
Doué pour vous appâter par un songwriting enjoué, armé d'un chanteur qui l'avantage, sachant flatter les sens par des guitares enjôleuses, Big Red Fire Truck plonge dans le grand bain de la première moitié des 80's sans avoir besoin de se mouiller la nuque. Il est désormais capable de nager sans flotteurs, ce nouvel EP plein d'entrain le prouve. Il gagnera à enclencher la vitesse supérieure, au niveau du format certainement, et peut-être même avec une production plus étoffée : sans que cela soit rédhibitoire les guitares nous ont paru un poil en retrait.
Mais ne basculons pas dans le perfectionnisme : peu de groupes réalisent un second EP d'un tel niveau, et « Trouble In Paradise » est à ne pas rater si vous aimez les formations que nous avons citées à titre de comparaison.