« Nous étions signées sur une major dès notre plus jeune âge. C'était comme voler avec des ailes de plomb. »
Interview réalisée par Vanessa et Ahasverus pour https://www.lalegionunderground.com - Mis en ligne le 14/02/2019.
Avant la sortie du nouvel album (dont le titre de travail était Chain) et en attendant que le Girl Next Door Tour ne frappe la France, voici une interview de The SoapGirls, le groupe de Shock-Rock sud-africain.
Les soeurs Debray nous racontent leur parcours, parlent de leurs convictions, de leur actualité et de la future tournée.
Il se passe toujours quelque chose avec The SoapGirls, alors bonne lecture...
The SoapGirls par Denis Charmot lors du Stinks Like Punk Tour 2018.
Bonjour The SoapGirls. Tout d'abord pourriez-vous présenter votre groupe pour nos lecteurs qui ne vous connaîtraient pas encore ?
Bonjour à tous, nous sommes The SoapGirls, Camille (basse) et Noemie (guitare). Nous sommes deux sœurs nées à Paris et nous avons grandi en Afrique du Sud. A l'âge de huit ou neuf ans, nous avons commencé à nous produire dans la rue, d'abord en vendant des savons pour récolter des fonds pour des enfants hospitalisés, ou pour d'autres causes en Afrique du Sud. Nous avons commencé la musique de manière professionnelle quand nous avons atteint douze ou treize ans. C'était une longue route, un peu folle, mais nous aimons ce que nous faisons. Nous sommes des artistes indépendantes, et nous ne donnons aucune limite à notre liberté d'expression.
L'attitude semble chez vous aussi importante que la musique. Avez-vous des idéaux que vous défendez au quotidien ?
Notre attitude se reflète dans notre musique, et au travers de chaque chose que nous faisons et que nous défendons.
Ce n’est pas facile, dans cette société hypocrite qui raconte aux gens qu’ils sont libres mais qui met en place toutes les limites pour stopper cette même liberté. Nous pensons qu'il est important - et peu importe ce que les autres en disent - de rester fidèle à ce en quoi l'on croit et de dénoncer les injustices et la censure.
Nous venons d'Afrique du Sud, un pays très conservateur, où des femmes se font violer chaque jour. Nous entendons parfois à ce propos des réflexions stupides de personnes qui prétendent que c'est la manière dont s'habillent ces femmes qui est le déclencheur de leur agression. Nous aimons nous confronter aux gens et les sensibiliser à ce sujet, quitte à récolter beaucoup d'emmerdes et à être jugées rien que pour la manière dont nous nous habillons.
Vous sentez-vous féministes ? Quelle en est pour vous la définition et quelle femme incarne le mieux ce mouvement ?
Nos opinions sont partagées en ce qui concerne le mot "féministe". Il représente l’égalité des sexes, mais il semble réservé uniquement aux personnes qui s’habillent et voient les choses d’une certaine manière. Certaines personnes se trompent sur la signification de ce mot, et croient qu'il est un permis qui leur donnerait une légitimité pour attaquer une autre femme sur ses choix. Les hommes semblent ne pas comprendre que le féminisme a été créé afin que nous puissions tous disposer d'un droit égal de vivre sans crainte et d'être comme nous l'entendons. Donc, pour répondre à votre question, nous croyons en l’égalité de tous.
Camille : Me concernant, Madonna personnifie mon idée du féminisme. Elle est forte, elle n'a peur de rien, et elle ose sans jamais remettre en question sa féminité.
Noemie : Pour moi, toute personne de sexe masculin ou féminin qui s'est battu pour ses convictions dans la lutte pour l’égalité est l’épitome d’un "féministe". Il semble qu'il y ait une idée confuse - et j'y vois une manœuvre politique - à propos de ce que doit être une féministe, de la manière dont elle doit agir, vivre, s’habiller ou se comporter. Tout ceci ne correspond absolument pas au féminisme.
Après une tournée européenne de près de cent-trente dates, vous êtes rentrées en Afrique du Sud voici environ deux mois. Vacances ou travail ?
Travail ! On adore ce qu'on fait, et on n'arrête jamais d'écrire, de composer, ou de bricoler des vidéos. Nous sommes toujours sur la route, alors nous aimons aussi profiter de la plage et du soleil quand on n'est plus en tournée.
Vous préparez actuellement le futur album. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Ce sera notre troisième album en tant que musiciennes indépendantes. Nous sommes très enthousiastes et nous venons juste de terminer son écriture. Nous l'enregistrerons bientôt puis nous partirons en tournée à partir d'avril avec quinze nouvelles chansons. Chaque album est différent, et celui-ci le sera également car notre son est en constante évolution. Nous avons hâte de délivrer nos titres en live.
"One Way Street", le nouveau single de The SoapGirls, sera sur leur prochain album.
Vous signez vos chansons "Camille Debray/ Noemie Debray" ou "The SoapGirls". Concrètement, comment se passe le processus de composition ?
Chaque chanson est écrite par nous deux, donc signée en tant que The SoapGirls. Quand nous écrivons un morceau, c’est un équilibre. Parfois un refrain vient en premier, parfois un couplet. Nous écrivons toujours à propos de la vie telle que nous la vivons. Chacune de nous apporte un élément différent et une nouvelle dimension aux compositions, et chaque titre que nous écrivons et composons surgit à partir d'une histoire ou d'une expérience personnelle.
Quelle est la part de votre activité artistique que vous préférez ?
Nous aimons toutes les deux aller en studio, enregistrer et donner vie aux chansons qui ont jailli durant la phase de composition, mais rien n'est comparable à l’énergie et à la satisfaction de voir un public réagir et se bouger sur la musique et la performance.
Rencontrer nos fans, c'est un véritable privilège pour nous. Nous aimons voir comment la musique peut rassembler les gens, quels que soient leur âge, leur origine ou leurs croyances.
En 2011, The SoapGirls était un duo de Pop Music qui vendait très bien. En 2015, vous renversez les tables et commettez "Calls For Rebellion", avec son virage revolt rock, que vous confirmerez en 2017 avec l'album suivant, "Society's Reject". Vous n'avez pas choisi la voie de la facilité ! Que s'est-il passé ?
Nous étions signées sur une major dès notre plus jeune âge. Quand on regarde en arrière, on peut être fières de la réussite, mais nous étions bridées dans notre créativité et, même si la route peut sembler plus facile, elle ne l'était pas à bien des égards. C'était comme voler avec des ailes de plomb. Le label ne souhaitait nous voir que d'une seule manière, et c'était une lutte permanente entre ce qu'ils voulaient qu'on fasse et ce qui nous correspondait vraiment. Finalement, après des années de combat pour nous libérer du contrat qui nous liait à eux, on leur a dit d'aller se faire foutre. Peu de temps après, tout ce que nous avions nous a été volé, tout, y compris nos guitares. On n'avait plus rien, sauf qu'on était maintenant devenues indépendantes. Alors on a monté un plan pour partir à New-York afin d'enregistrer les chansons que nous avions envie de faire.
Malheureusement, des gens cupides avaient les mêmes idées que le label, et bien qu’ils nous aient proposé une énorme somme d’argent pour un contrat, nous ne voulions plus perdre notre liberté artistique. Ils ont pris nos chansons et les ont transformées en quelque chose de complètement différent de ce que nous avions enregistré, et nous ne nous reconnaissions pas dans ce que nous entendions. Alors on a quitté New-York. A partir de là, on a bossé très dur, économisé, tout donné pour notre musique, et on a enregistré "Calls For Rebellion". Puis on est parties en Angleterre et on a embarqué pour notre première tournée internationale. Le soutien des fans a été fantastique, et on leur en est grandement reconnaissantes.
Quels sont vos souvenirs scéniques les plus marquants ?
Noemie : L'un des moments les plus drôles que j'ai connus sur scène : je portais un body tout blanc, je jouais, je chantais, je m'éclatais, quand j'ai senti un liquide chaud qui coulait le long de mes cuisses. Je me souviens que le public en face de moi paraissait surpris et choqué. J'ai regardé en bas et j'ai vu du rouge partout. J'avais mes règles, mais certaines personnes dans le public ont cru qu'il s'agissait d'un effet de scène, avec du faux sang. Alors elles prenaient ce sang pour s'en faire comme des peintures de guerre sur le visage... Je n'ai pas eu le cœur à leur dire que c'était vraiment du sang !
Camille : Au cours d'un show au Pays de Galles, une vieille femme de quatre-vingt ans est montée sur scène pour la chanson "Bad Bitch". Elle a enlevé son soutien-gorge et elle a commencé à le faire tourner en l'air. C'était épique de voir quelqu'un d'aussi libre manifester autant de plaisir durant notre show !
The SoapGirls - Calls For Rebellion (2015)
Camille, quel est le plus gros défaut de Noémie ?
Le plus gros défaut de Noemie est qu'elle peut se montrer très impatiente et s'énerver quand tout n'es pas parfait.
Noémie, quel est le plus gros défaut de Camille ?
Elle peut être trop sensible parfois, et prendre les choses trop à cœur. Elle est aussi très dure au travail, où elle peut se montrer autoritaire.
La tournée 2019 démarrera dans quelques mois. Elle passera par les USA et l'Europe, selon mes informations. Avez-vous des précisions quant aux dates françaises ?
The Girl Next Door Tour inclura également les USA pour la première fois.
Nous sommes toujours en phase de réservation des salles, nous n’avons donc pas encore toutes les dates, mais nous avons hâte d’être de retour en France !
Le batteur Sam Ogden, qui vous accompagnait sur le Stinks Like Punk Tour, sera-t-il présent sur la nouvelle tournée ?
Non, on l'a tué lors de la dernière tournée. On plaisante ! Bien sûr, il sera là.
The SoapGirls avec Sam Ogden sur le Stinks Like Punk Tour 2019. Photo Luca Viola.
Crédits photograhiques :
La photo de The SoapGirls est de Denis Charmot https://www.facebook.com/DenisCharmotPhotos/.)
La photo de The SoapGirls avec Sam Ogden est de Luca Viola.
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